Texte: Emmanuel DUPUIS
Mise en scene: Christophe GIVOIX
Scénographie et décor: Gad COHEN
Costumes: Lucie MARQUIS
Fabrication:Classe RCI du Lycée Jean Rostand
Communication/coordination:Cécile MOATTI
Je pars d’une situation quotidienne, avec des personnages malheureusement ordinaires qui se retrouvent à la rue, victimes de la crise et rêvent de s’en sortir. Et tout autour d’eux la vie se transforme en une chose extraordinaire où l’on ne voit plus bien la limite entre rêve et réalité.
Deux personnages au bord du monde sont les témoins privilégiés de sa chute. Dieu s’ennuie, la société se prend les pieds dans sa course folle qui ne la conduit nulle part. Je veux montrer le moment où tout se décale : une société en crise, des hommes sans travail, sans espoir ayant perdu tout contact avec la société active, un Dieu qui cherche à se distraire. Je veux faire de ces situations où se mélangent, réalisme, imaginaire et absurde, le théâtre d’une comédie.
J’espère aussi laisser libre à chacun de se raconter sa propre histoire ne pas être trop démonstratif de ne pas être trop symboliquement explicite.
J’ai essayé de garder un rythme plutôt rapide où les répliques courtes s’enchaînent. Il me semble que rien ne doit être appuyé, comme si les personnages étaient dépassés par leur propre langage. Les dialogues ressemblent à des improvisations, glissant d’une réplique à l’autre, dans un joyeux tac au tac.
Rêver, c’est bien la seule chose qui nous appartienne. Ensemble rêvons nos rêves pour sortir de nos réalités.
Emmanuel Dupuis
Brinduc: Si seulement il y avait un train pour Bora Bora.
Caul: Tu le prendrais ?
Brinduc: Un peu que je le prendrais. Je m'y vois déjà: L'hiver à Bora Bora, le soleil de Bora Bora, la plage de Bora Bora, la mer de Bora Bora, douce, chaude, claire, les filles de Bora Bora.
Annonce: " Le train pour Bora Bora partira avec 1h de retard voie 104"
Caul : Tu as entendu comme moi?
Brinduc : Quoi?
Caul : Alors ?
Brinduc : Alors quoi ?
Caul : Tu fais quoi ?
Brinduc : Ca se voit pas ce que je fais ?
Caul : Tu bouges pas ?
Brinduc : Il n'y a pas de voie 104.
Caul : C'est vrai tu as raison !
Brinduc : Je sais pas ce qui se passe ?
Caul : On a des hallucinations !
5 octobre
Premier rendez-vous avec les élèves de la classe de RCI (Réalisation Chaudronnerie Industrielle) du lycée Jean Rostand.
Avec le professeur Arnaud Eybert Bérard, le Conseiller d'éducation Yves Goré et le proviseur adjoint Patrick Cervi, nous présentons le projet aux élèves, leur rôle et les différentes tâches auxquelles ils devront répondre. Il leur est demandé de concevoir et réaliser un photomaton de théâtre avec un cahier des charges précis.
Un fois le projet présenté, nous commençons à travailler; le professeur demande aux élèves de dessiner ce que leur évoque Las Végas; ils font des recherches sur ordinateur, choisissent des motifs et se mettent au travail. Nous leur montrons aussi les images des esquisses de costume réalisées par Lucie Marquis et des sources d'inspiration esthétiques: masques et habits de carnaval des montagnes, portrait de Jean Michel Basquiat... Ces dessins habilleront le photomaton.
Chacun part sur ses envies, nous discutons des premières propositions.
La société photomaton a mis à la disposition de la classe un photomaton qui a été livré au lycée au mois de septembre. Il est dans la réserve, nous allons le chercher avec les élèves et l'emmenons dans la salle de classe.
Nous allons aussi voir l'atelier où les élèves montrent leurs différentes techniques de soudure et des graphismes réalisés en soudure. Nous mettons les masques protecteurs, la lumière est aveuglante, je suis frappé par les rideaux de plastique rouge et les bleus de travail.
Nous nous quittons au bout de trois heures; beaucoup de dessins ont été réalisés parmi lesquels il va falloir choisir. J'emporte avec moi les photographies des dessins pour les montrer au reste de l'équipe.
14 octobre
Seconde visite de la classe, avant les vacances de la Toussaint, nous prenons une heure pour faire le point sur les différentes réalisations et convenir d'un rendez-vous après les vacances entre la classe et Gad Cohen le scénographe.
2 novembre
Gad Cohen est passé le 2 novembre avec une esquisse de photomaton inspirée des dessins des élèves: un photomaton $ (dollar) surmonté d'une étoile. Il a ensuite travaillé avec les élèves à la faisabilité des dessins choisis destinés à figurer sur le photomaton. Il a pris connaissance de l'atelier et les élèves se sont fait un plaisir de lui montrer leur outillage et son utilisation.
Gad:
Lorsque j’ai rencontré les élèves pour la première fois, Arnaud Eybert Bérard, professeur de chaudronnerie, et Christophe les avaient déjà fait travailler sur leur vision de Las Vegas. Après avoir fait leur recherche sur le net, ils ont dessiné ce que leur évoquait cette ville. Ce sont ces dessins qui ont constitué la matière première de ce qui allait être l’élément scénographique majeur : le photomaton.
Un de ces dessins représentait le « S » du dollar américain. D’où l’idée de donner cette forme au photomaton.
Le premier contact avec eux s’est fait naturellement. L’idée était de les impliquer très vite dans un projet concret. De leur donner la possibilité d’investir leurs connaissances en chaudronnerie et de valoriser leurs propres propositions.
Après avoir choisi parmi les dessins, chacun s’est accaparé un des éléments qui viendrait se greffer à la structure principale. Nous avons échangé sur la faisabilité. Très vite, les questions pratiques sont apparues, des solutions à trouver, des cotes à définir, des plans à dessiner. Et une envie de s’impliquer pour chacun.
L’un d’eux a spontanément fait des recherches sur internet sur les différents photomatons « artistiquement customisés ».
Deux des élèves m’ont fait visiter l’atelier, m’ont montré chacune des machines et leurs possibilités techniques. Leur enthousiasme faisait plaisir à voir. Ils m’ont clairement exprimé l’envie de pouvoir monter et exposer leur travail à la gare Saint-Lazare (partie du projet évoqué par Christophe).
Cette première rencontre s’est achevée avec l’envie de se revoir rapidement.
16 décembre
Première visite en classe de français histoire avec leur professeur Sébastien Rosevègue, nous allons travailler sur le texte. Les élèves sont quatre puis cinq en deuxième heure, ils ont été bien préparés. Ils ont déjà lu du théâtre en classe (Cyrano de Bergerac) et connaissent les codes de base. Nous commençons la séance par des exercices ludiques de mise en jeu, de réactivité; nous nous échauffons le corps et la voix sans forcer, mine de rien. Tout le monde se prend au jeu. Puis nous lisons par deux des extraits de texte ayant trait au rêve. Nous jouons avec des mouvements de tête, des jeux de regard et enfin nous terminons par des mises en scène préparés en autonomie et en 5 minutes de chacun des extraits. Enfin chaque duo présente sa mise en scène aux trois autres. Ce sont de bons acteurs; ils y prennent du plaisir et s'investissent.
Il faudrait nommer tous les élèves; le travail est stimulant à leur coté. La création de la pièce prend d'autres couleurs. Ils ont très envie de la présentation de leur photomaton dans le hall de la Gare Saint Lazare et attendent le jour de cette installation. Cette séance donne envie d'aller plus loin encore. Nous travaillerons des scènes entières la prochaine fois.
13 janvier
Retour en français, nous travaillons les scènes complètes, la première et la deuxième. Gad m'accompagne cette fois ci; il fera des prises de vue du travail. Abdel et Zacharia étaient là la dernière fois mais Clément et Laurent (qui arrive à l'instant au lycée) découvre le travail théâtral; nous reprenons un échauffement de base et recommençons de petites mises en scène. Cette fois ci, il s'agit de scènes complètes donc plus longues et qui demandent à être traités avec un début et une fin, des entrées et des sorties de scène. S'ils le voulaient, les élèves auraient la capacité de jouer la pièce; il faudrait avoir le temps et pouvoir s'investir sur la durée. Nous projetons une séance le 27 janvier suivant et demandons aux élèves d'apprendre les scènes par coeur pour la fois suivante.